La merveilleuse histoire du VIOXX
Section « VIOXX : 2004, le premier tsunami » du chapitre 6
« Gouvernement et Industrie » du livre « Au nom de la science » de Andew
Goliszek et Thierry Souccar.
C’est le plus grand scandale de l’histoire des médicaments. Pendant cin
ans, le laboratoire américain Merck n’a pas dit la vérité sur
l’innocuité de son anti-inflammatoire miracle, le VIOXX (rofécoxib).
L’enjeu : les deux milliards et demi de dollars annuels que lui
rapportait le médicament. Des autorités sanitaires létargiques ont fermé
les yeux sur les preuves alarmantes qui s’accumulaient. Mais le 28
septembre 2004, acculé par les révélations de chercheurs indépendants
qui se multipliaient, Merck est contraint de retirer le VIOXX du marché.
Aux USA la Food and Drug Administration (FDA) est violemment critiquée
pour ne pas avoir réagi plus tôt. Mais en France, l’Agence française de
sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) est étrangement
épargnée.
En réalité l’affaire du VIOXX pose une nouvelle fois le problème de la
police sanitaire, de ses incapacités à prévenir les crises et, comme le
dit le Pr Bernard Debré, « la délicate question de l’indépendance des
autorités de tutelle vis-à-vis du contexte économique et social que
représente l’industrie pharmaceutique. Cette indépendance est un
leurre ».
Après le crash du VIOXX, c’est maintenant l’heure des comptes. Chez
Merck, on sort les calculettes : trene milliards de dollars évaporés en
un jour sur le marché des actions. Aux USA, les épidémiologistes tentent
de chiffrer le nombre de victimes en unités d’infarctus et d’arrêts
cardiaques. On en annonce vingt-huit mille, puis cinquante mille, puis
quatre-vingt-dix mille, puis cent quarante mille. Un décompte de
tsunami. Six cent mille plaintes sont attendues par la justice
américaine. Une commission d’enquête sénatoriale a déjà commencé ses
auditions pour comprendre comment on en est arrivé là.
En France, une commission d’enquête était certe réclamée en janvier 2005
tant par les députés de la majorité que de l’opposition, mais au moment
où ce livre est achevé, on en était encore aux palabres ...
Aprtès le retrait du VIOXX, les responsables de l’AFSSAPS se sont
répandus dans les médias pour expliquer que la France n’est pas les USA,
que les conditions de prescriptions y étaient différentes, avec des
doses plus faibles et des durées plus courtes, que les autorités y ont
été plus vigilantes et que l’on doit s’attendre à peu d’effets
secondaires.
Hélas ! Comme on va le voir, ce discours ne résiste pas à l’examen des
faits : Si la FDA a tergiversé, l’AFSSAPS n’a même pas vu venir la
catastrophe. Alors que la traditionnelle transparence des débats permet
aux USA de retracer le périmètre de la catastrophe et, surtout,
d’évaluer à plusieurs dizaines de milliers le nombre de victimes, la
tradition française du secret ne permettra certainement jamais de savoir
ce qui s’est réellement passé chez nous. Le chiffre de « quelques
centaines » de victimes évoqué par les autorités en janvier 2005 est
vraisemblablement très en deçà des la réalité.
Les victimes du VIOXX, si elles survivent, pourront toujours demander à
l’AFSSAPS pourquoi elle a avalé avec une singulière complaisance les
affirmations que lui distillait le laboratoire Merck, jusqu’à les
reprendre parfois à son compte. Pourquoi elle a fait preuve d’une si
longue atonie devant les indices qui s’accumulaient. Car une catastrophe
sanitaire comme celle du VIOXX, ce n’est finalement pas comme un
tsunami. Il y a, des années plus tôt, des signes avant-coureurs, comme
le montre l’histoire française de ce médicament, que nous avons
reconstituée.
La merveilleuse histoire du VIOXX
Au moment où commence notre histoire, il existe sur le marché plusieurs
médicaments concurrents du VIOXX, mais ils sont anciens, comme le
diclofénac ou l’ibuprofène qui, eux, appartiennent à la classe
anti-inflammatoires non-stéroïdiens.
Le VIOXX et son concurrent le CELEBREX sont les navires amiraux d’une
nouvelle famille d’anti-inflammatoires, les coxibs, qui doit
révolutionner le traitement de l’arthrose.
Un chercheur s’inquiète
En 1997, soit trois ans avant la commercialisation du CELEBREX et du
VIOXX, le Dr John Schmedje (université du Texas, Galveston) a pressenti
que le mécanisme d’action de ces nouveaux anti-inflammatoires portait en
lui le risque d’accidents cardiovasculaires.
Premier drapeau rouge
Le 23 novembre 1999, le VIOXX (rofécoxib) de Merck, reçoit une AMM
européenne, qui fait suite à l’autorisation de mise sur le marché
américaine qu’a délivré la FDA le 21 mai. Il est commercialisé en France
en mai 2000 à la dose maximum de 25mg/j, avec pour indication le
« soulagement des symptômes dans le traitement de l’arthrose chez
l’adulte ». Son concurrent, le CELEBREX (celecoxib) de Pfizer, reçoit
son AMM le même mois et entre en officine en novembre 2000.
Pourtant, ni le CELEBREX ni le VIOXX n’ont, dans les études cliniques
soumises par leurs fabricants aux agences sanitaires, fait mieux que les
médicaments existants à l’époque. Pourquoi alors leur accorder une
AMM ? Parce que les experts européens et ceux de l’AFSSAPS sont
convaincus que ces nouveaux anti-inflammatoires entraînent moins
d’effets indésirables digestifs « graves » que les anti-inflammatoires
existants.
Pour persuader les experts des autorités sanitaires que leurs
médicaments épargnent les muqueuses de l’estomac, chaque laboratoire a
en effet mis sur pied une étude spécifique.
Merck a soumis dès 1999 à la FDA et aux agences européennes les
résultats d’une étude baptisée VIGOR qui démontre que le VIOXX est moins
toxique pour l’estomac qu’un autre anti-inflammatoire, le naproxène.
(L’étude qui ne sera publiée que le 23 novembre 2000 dans un journal
médical était signée de treize médecins et chercheurs. Parmi eux, onze
avaient des liens financiers avec Merck. Les deux restants étaient
directement salariés du laboratoire.)
L’étude VIGOR, si elle rapporte effectivement moins de complications
digestives avec le VIOXX, révèle cependant un fait troublant : il y a
quatre fois plus d’infarctus dans le groupe ayant pris le nouveau
médicament ! Comment les agences ont-elles réagi à ces nouvelles
inquiétantes ?
A la FDA, Shari Targum, qui dirige le département des médicaments
anti-inflammatoires, rédige le 18 novembre 1999 un mémo dans lequel elle
fait état de ses inquiétudes à propos « des décès et des événements
cardiovasculaires en excès dans le groupe 1 [celui du VIOXX] par rapport
au groupe B [celui du naproxène] ». C’est le premier drapeau rouge
agité dans ce dossier.
Rien n’indique qu’en France l’AFSSAPS se soit à ce moment inquiétée du
risque cardiovasculaire rapporté par l’étude VIGOR. Peut-être croit-elle
que le dosage de 50 mg/j utilisé dans cette étude ne la concerne pas ?
A la fin de l’année 2000, les autorités sanitaires avaient connaissance
des résultats de l’étude sur le VIOXX portant sur 20 742 personnes. Ces
études montraient déjà qu’une personne qui prend du VIOXX voit son
risque d’infarctus ou d’accident vasculaire cérébral multiplié par 2,3
par rapport à quelqu’un qui n’en prend pas.
Février 2001 : la vérité
Le 8 février 2001, soit près de deux ans après avoir eu vent des
problèmes cardiovasculaires de l’étude VIGOR, la FDA se décide à réunir
son commité d’experts sur l’arthrose. A l’ordre du jour : l’examen
minutieux des données de VIGOR. Et là, surprise ! Les limiers de la FDA
découvrent que les accidents cardiovasculaires du groupe qui prenait le
VIOXX ont été minorés. En réalité il y a beaucoup plus d’événements
cardiovasculaires que ceux qui ont été rapportés : cinq fois au lieu de
quatre fois plus ! Et ils apparaissent dès le premier mois de prise.
En France, aucun communiqué, aucune mise en garde de l’AFSSAPS aux
médecins et aux pharmaciens n’accompagne les « redressements » opérés
par la FDA en février.
Merck conforté par l’AFSSAPS
Alerté par les graves indices de l’étude VIGOR, le Dr Eric Topol, un
cardiologue américain de la Clinique Cleveland (Ohio) et son équipe
publient le 22 août 2001, dans le Journal of the American Medical
Association, une étude sur le risque cardiovasculaire lié à la prise de
VIOXX et de CELEBREX.
Pour le VIOX, Topol et son groupe ont utilisé les données réelles de
l’étude VIGOR, telles que la FDA les a corrigées. Ils y ont rajouté les
résultats de deux autres études sur le VIOXX qui avaient été soumises
par Merck aux agences sanitaires. L’étude n° 85 et l’étude n° 90
portaient sur un total de 2020 patients qui avaient pris soit du VIOXX,
soit un placebo.
Pris collectivement, tous ces résultats confirment ce que l’on
présentait, à savoir que le taux d’infarctus sont significativement plus
élevés avec le VIOXX qu’avec un placebo. Ce n’est plus un drapeau
rouge, c’est une fusée éclairante qui vient d’être tirée.
Le Dr Topol conclut ainsi son analyse : « Les données disponibles
conduisent à tirer la sonnette d’alarme pour ce qui est du risque
cardiovasculaire avec le coxibs. » Il ajoute : « Il est indispensable
qu’une étude soit conduite pour évaluer de manière spécifique le risque
cardiovasculaire de ces médicaments. »
En 2005, après le retrait du VIOXX, l’AFSSAPS tentera de se dédouaner de
ses responsabilités en prétendant que les conditions de prescription en
France (25 mg/j) mettaient les patients à l’abri de tous problème.
Faux, car avec cette publication, une étape dans la connaissance du vrai
visage du VIOXX a été franchie. Eric Topol vient de montrer que c’est
toute la gamme des dosages du médicament qui est désormais suspecte.
Merck a d’abord tenté d’obtenir le retrait de cette étude ou de ses
conclusions sévères en rencontrant Eric Topol avant la publication. Mais
Topol reste inflexible. Alors le laboratoire réagit en réunissant ...
son service marketing. Une question lui est posée : comment minimiser
les effets indésirables du VIOXX qui commencent à émouvoir les
professionnels de santé ? Le marketing de Merck trouve la parade. Ce
n’est pas, explique-t-on chez Merck, que le VIOXX provoque plus
d’infarctus que le naproxène auquel il était comparé dans l’étude VIGOR,
c’est que le naproxène fluidifie le sang, donc diminue le risque
d’infarctus ! Il fallait y penser.
Il s’agit bien sûr d’une explication montée de toutes pièces, qui ne
repose sur aucune réalité scientifique. Mais armé d’une hypothèse
plausible, Merck peut faire donner l’artillerie lourde. Des communiqués
de presse assurent de « la sécurité cardiovasculaire du VIOXX. » Des
professeurs de médecine, les fameux « leaders d’opinion » au service de
Merck, écrivent aux journaux médicaux et infiltrent les congrès
médicaux. Ils y reprennent en boucle l’argument imaginé par le service
marketing du laboratoire pour expliquer le risque cardiovasculaire mis
en évidence dans l’étude VIGOR avec le VIOXX. Et ça marche !
C’est ce moment que choisit notre agence nationale, l’AFSSAPS, pour
réagir à la sonnette d’alarme tirée par Eric Topol. Va-t-elle, comme le
demande Topol, exiger une étude sur les effets indésirables du VIOXX ?
Va-t-elle retirer ou sévèrement restreindre l’usage du VIOXX comme elle
en a les moyens et comme il lui arrive de la faire sans état d’âme pour
les substances naturelles (
Voir ici) ? Le 24 août 2001, deux jours après le cri d’alarme d’Eric
Topol, l’AFSSAPS publie un communiqué de presse sur le risque
cardiovasculaire du VIOXX et du CELEBREX.
C’est un satisfecit décerné à Merck.
L’AFSSAPS y critique le travail de Topol, accusé de comporter
« différentes faiblesses méthodologiques ». Pour expliquer l’excès
d’infarctus des patients qui prenaient du VIOXX, l’AFSSAPS assure que
« cette différence serait liée à l’action antigrégante plaquettaire
(fluidité sanguine) du naproxène que ne possède pas le rofécoxib ».
C’est l’explication inventée par le marketing de Merck !
Il y a pourtant une autre hypothèse, bien plus logique : celle d’un
effet indésirable du VIOXX. Mais l’AFSSAPS ne l’évoque à aucun moment.
Conclusion de l’agence française : le travail publié par Topol « ne
contient pas de données nouvelles « et « les effets indésirables de ces
médicaments font l’objet d’une surveillance particulière depuis leur
commercialisation ».
Septembre 2001 : le coup de sang de la FDA
A l’inverse, aux USA, la FDA n’a pas gobé le scénario imaginé par Merck.
Et au contraire de l’agence française, elle durcit le ton.
L’agence américaine adresse le 17 septembre 2001 un courrier incendiaire
à Merck. Elle l’y accuse de présenter « de manière sélective »
l’explication hypothétique selon laquelle le naproxène préviendrait les
accidents cardiovasculaires, et ce afin de faire apparaître les taux
d’accidents provoqués par le VIOXX « artificiellement gonflés ». La FDA
rappelle à Merck qu’il n’existe aucune étude pour soutenir cette
affirmation. Elle exige du fabricant qu’il cesse immédiatement de
présenter cette version des faits et qu’il adresse une lettre de mise au
point à tous les médecins et pharmaciens devant il a développé cet
argumentaire depuis mai 2001. Devant la colère de l’agence, le
laboratoire recule : « Nous avons vu le problème, explique un
porte-parole. Nous l’avons corrigé rapidement. » Peu de temps après, en
effet, un courrier évoquant de possibles effets indésirables
cardiovasculaires liés au VIOXX est adressé par Merck à cent médecins et
deux mille pharmaciens.
A la fin de l’année 2001, cinquante-huit plaintes ont été déposées par
des patients américains contre le VIOXX. En cause : des infarctus et
plusieurs décès.
Décembre 2001 : des chercheurs s’émeuvent
Au moment où l’AFSSAPS reprenait à son compte les arguments de Merck
pour expliquer les résultats de l’étude VIGOR, le Dr Peter Jüni (Berne,
Suisse) adressait une lettre au journal Archives Of Internal Medecine.
Publiée le 9 décembre, elle démontre, chiffres à l’appui, que l’argument
selon lequel le naproxène protègerait le cœur ne peut à lui seul
expliquer les infarctus relevés avec le VIOXX. Jüni, comme Topol,
réclame une ré-analyse des données recueillies avec le VIOXX par des
chercheurs indépendants.
A la fin de 2001, les autorités sanitaires avaient connaissance des
résultats d’étude sur le VIOXX portant sur 21 432 patients. Ces études
montraient qu’une personne qui prend du VIOXX voit son risque
d’infarctus ou d’accident vasculaire cérébral multiplié par 2,24 par
rapport à quelqu’un qui n’en prend pas.
2002 : le sacre du VIOXX
Dès son lancement en 2000, le CELEBREX, premier anti-COX2 remboursé, a
été adopté par 80% des rhumatologues prescripteurs
d’anti-inflammatoires. En janvier 2001, il représentait 15% de ces
prescriptions. Un an après, confrontés par le soutien de l’AFSSAPS,
CELEBREX et VIOXX sont prescrits dans 43% des cas de polyarthrose, 36%
des cas d’arthrose périphérique et 30% des cas d’arthrose vertébrale, et
même 12% des cas de lombalgies (alors qu’ils ne sont pas indiqués pour
cela).
On estime que un million quatre-vingt-huit mille patients ont pris du
VIOXX entre juillet 2001 et juin 2002, et deux millions deux cent seize
mille patients du CELEBREX entre janvier 2001 et décembre 2002.
Le coût pour la collectivité suit la même pente. Les laboratoires qui
vendent le VIOXX et le CELEBREX ont obtenu du Comité économique des
produits de santé (Ceps) des prix de vente très élevés. Cette faveur est
normalement accordée aux produits très efficaces. Dans la négociation,
le Ceps avait imposé que le prix du VIOXX baisse à partir de début 2003,
comme l’indique le Journal Officiel du 3 juillet 2001. Mais un avis
paru au Journal Officiel du 3 janvier 2003 annulera la baisse de prix
programmée pour le VIOXX !
Le prix du CELEBREX ne baissera, lui, qu’en juillet 2004. Encore cette baisse sera minime.
Les deux médicaments étant remboursés à 65%, la Caisse nationale
d’assurance maladie a déboursé, en 2001, 125 millions d’euros pour le
CELEBREX (troisième place des dépenses en médicaments) et 29 millions
d’euros pour le VIOXX. Soit près de 155 millions d’euros. En 2002, la
note est encore plus salée : 225 millions d’euros pour les deux
médicaments.
Du 12 au 15 mars 2002, le salon du Medec, rendez-vous annuel de la formation
des médecins généralistes, présente une conférence sur la rhumatologie.
Trois grands professeurs français viennent y expliquer tout le bien
qu’ils pensent des nouveaux anti-inflammatoires, et notamment du VIOXX.
La conférence a été « parrainée » par Merck. Le Pr René-Marc Flipo
(hopital Roger-Salengro, Lille) se voit confier une tâche délicate,
celle de présenter la « tolérance » du VIOXX. Le Pr Flipo, qui est aussi
rapporteur auprès de la Commission de la transparence - chargée de
fixer le prix et le niveau de remboursement des médicaments - rassure
les généralistes venus l’écouter : « Concernant les quatre accidents
thrombotiques décrits dans la littérature, ils sont survenus chez des femmes
à très haut risque sans prévention, insiste le Pr Flipo. Quand on
reprend les banques de données sur le rofécoxib, on ne retrouve aucune
différence significative. » Ainsi rassérénés, les participants au Medec
sont invités à élire « le médicament de l’année ». Ils plébiscitent
joyeusement ... le VIOXX ! En septembre, Merck reçoit le prix dans les
salons du Sénat et en présence d’un ministre.
Le 11 avril, une étude publiée dans le journal Science dévoile le
mécanisme par lequel les nouveaux anti-inflammatoires comme le VIOXX
augmentent le risque cardiovasculaire.
Le 19 avril, alors que deux nouvelles analyses publiées aux USA donnent du poids
aux craintes d’Eric Topol, la FDA demande à Merck de mettre
spécifiquement en garde les utilisateurs de VIOXX sur le risque
d’accident cardiovasculaire.
Le 22 juillet 2002, l’AFSSAPS publie un nouveau communiqué sur les
anti-inflammatoires. En réussissant l’exploit de ne rien dire sur les
risques cardiovasculaires du VIOXX.
Evoquant les « complications digestives » attribuées au CELEBREX et
révélées quelques semaines plus tôt par un journal médical (lire
l’encadré), l’AFSSAPS indique avoir saisi la Commission de la
transparence afin de réévaluer le « service médical rendu » du VIOXX et
du CELEBREX : en clair il s’agit simplement de réexaminer le prix de ces
médicaments et leurs modalités de remboursement. (En fait, il faudra
attendre deux ans pour que la Commission de la transparence reconnaisse
que, par rapport aux anti-inflammatoires classiques, « la meilleure
tolérance digestive est minime ».)
L’AFSSAPS ouvre parallèlement le parapluie de l’Agence européenne du
médicament (Emea) en lui demandant une réévaluation européenne
bénéfice-risque de ces médicaments. Et les mois passent.
En octobre 2002, une étude publiée dans le Lancet trouve que les
utilisateurs de VIOXX à dose élévée ont un risque de maladie
coronarienne multiplié par 1,7 par rapport aux non-utilisateurs. Pour
les nouveaux utilisateurs, le risque est presque multiplié par deux.
Ce même mois, le Dr Eric Topol publie un nouvel article alarmant sur le
risque cardiovasculaire attaché à la prise de coxibs et renouvelle sa
demande aux agences sanitaires « d’une étude contrôlée pour évaluer la
sécurité cardiovasculaire de ces médicaments ». Sans susciter de
réaction du côté de l’AFSSAPS.
Une étude CLASS
Le fabricant de CELEBREX a publié en 2000 les résultats d’une étude
baptisée CLASS, qui montre que sa molécule occasionne moins d’’lcères à
l’estomac que les anti-inflammatoires classiques.
Le 1er juin 2002, un éditorial du British Medical Journal accuse Pfizer,
le fabricant du CELEBREX, d’avoir falsifié les résultats de l’étude
CLASS. Les données rassurantes de l’étude CLASS ne portaient que sur les
six premiers mois de deux études en réalité distinctes. L’une des
études avait duré quinze mois ; l’autre un an. En se ne rapportant que
les résultats des six premiers mois alors qu’ils disposaient des
résultats définitifs, les invistigateurs et le laboratoire avaient
manifestement manipulé l’information. Et on comprend pourquoi : la
plupart des effets indésirables enregistrés après les six premiers mois
concernaient le groupe qui avait pris le CELEBREX. En fait, à l’issue
des deux études complètes, on relevait autant d’ulcères compliquées de
perforation, saignement ou sténose avec les trois médicaments. Donc
aucun avantage réel du CELEBREX, comme le proclamait jusqu’ici le
fabricant.
Ecrit par : José K. hier, 07:46 AM
QUOTE(Gascon @ Aug 29 2005, 03:36 PM) [b]Pour les victimes du VIOXX,
Tant que nous y sommes, voici l’adresse de l’UNADFI pour toutes les
victimes des sectes qui proposent des régimes imbéciles et dangereux,
des jeûnes au végétalisme le plus extrême, celles qui proposent des
thérapies plus bidons les unes que les autres et celles qui profitent du
malheur et de la détresse des gens pour leur vendre des poduits plus ou
moins dangereux : UNADFI 130 rue de Clignancourt, 75018 Paris
Parmi les sectes proposant des régimes alimentaires irrationnels et
autres techniques dangereuses pour la santé de leurs adeptes, on
trouve : Eccovie Enfants Indigo Eglise Universelle du Royaume de Dieu
Gurdjieff Kinésiologie Mahikari Hamer and co Reiki Soka Gakkaï Témoins
de Jehovah
Si vous connaissez des adeptes de ces sectes, vous pouvez essayer de les aider en les adressant à leur .
Ecrit par : Gascon hier, 03:15 PM
Suite du premier post
du chapitre 6 « Gouvernement et Industrie » du livre « Au nom de la science » de Andew Goliszek et Thierry Souccar.
2003 : gros sous et nouvelles inquiétantes
Le 26 octobre, le Dr Daniel Solomon (Brigham & Women’s Hospita,
Boston) intervient lors du 66eme congrès annuel de l’American College of
Rheumatology à Orlando en Floride. Il y présente les résultats d’une
étude sponsorisée par Merck sur 54 475 personnes qui montre que le VIOXX
augmente de 24% le risque d’infarctus par rapport à son concurrent
CELEBREX. Le risque est encore plus élevé dans le premier mois : +39%.
Entre le trentième et le quatre-vingt-dixième jour, le risque est
augmenté de 37% avec le VIOXX. Le Dr Salomon déclare lors de sa
conférence : « Les coxibs sont devenus les traitements les plus courants
de l’arthrose. Il est important que les médecins et les patients notent
que le VIOXX augmente le risque d’infarctus dans cette étude et que son
usage doit être jaugé par rapport à ce risque potentiel. »
Cette année-là, les ventes mondiales de VIOXX et de CELEBREX ont dépassé 6,6 milliards de dollars.
2004 le rideau tombe
En avril 2004, l’Agence européenne du médicament admet que les coxibs ne
sont pas moins dangereux pour le tube digestif que les
anti-inflammatoires non stéroïdiens classiques. L’Agence spécifie qu’ils
entraînent probablement un risque cardiovasculaire plus élevé. Si ces
médicaments n’ont pas plus d’intérêt que leurs prédécesseurs et qu’ils
sont potentiellement dangereux, il paraît logique de ne plus les
prescrire. Mais ni l’Agence Européenne ni l’AFSSAPS ne demandent le
retrait de leur AMM, se contentant de nouvelles mises en garde.
Le même mois, Merck annonce que les ventes mondiales de VIOXX ont
atteint 660 millions de dollars au premier trimestre, en hausse de 30%
par rapport au premier trimestre 2003.
En juin, l’une des principales mutuelles de soins privéeé des USA émet
un avis sévère sur la prescription de VIOXX et de CELEBREX. Express
Scrips Inc., auprès de laquelle cinquante millions d’américains sont
assurés, recommande aux médecins de « placer ces médicaments en queue de
la liste des options thérapeutique, la première place étant réservée
aux médicaments OTC comme l’aspirine et l’Ubuprofène ou aux versions
génériques de médicaments comme le naproxène. Seule l’apparition
d’effets secondaire ou l’échec du traitement doivent conduire les
médecins à prescrire le VIOXX, le CELEBREX et les autres molécules de la
même famille. »
Express Scripts Inc. n’est pas une agence sanitaire, mais son rôle dans
le système de santé américain est capital. Express Scripts Inc. a donc
pris ses responsabilités.
Une attitude qui contraste avec celle des agences européennes. Le même
mois, en effet, les autorités européennes rendent leur verdict sur le
rapport bénéfice-risque des coxibs. Il est entièrement repris à son
compte le 1er juillet 2004 par l’AFSSAPS : « La sécurité d’emploi des
coxibs, affirme l’agence française, n’est pas remise en cause dans les
indications qui ont été approuvées par l’AMM. » L’AFSSAPS précise ainsi
qu’il « est nécessaire de renforcer les mises en garde et les
précautions. » Les coxibils sont contre-indiqués en cas d’ulcère ou de
saignement de l’intestin, de maladie grave du foie, des reins,
d’insuffisance cardiaque sévère, d’allergie. C’est le dernier avis avant
le désastre.
L’AFSSAPS sait-elle que la FDA a financé une étude pour sonder le
dossier médical d’un million quatre cent mille assurés californiens, à
la recherche d’infarctus et d’accidents vasculaires cérébraux survenus
entre 1999 et 2001 ?
Le mardi 24 août 2004, en dépit de l’opposition de ses supérieurs à une
telle démarche, le Dr David Graham, du bureau de pharmacovigilance de la
FDA, prend l’avion pour se rendre à Bordeaux où se tient la réunion
annuelle de la Société internationnale de pharmacovigilance. Dans sa
serviette, une véritable bombe qu’il fera exploser le lendemain : les
résultats de l’étude californienne. Que dit-elle ? Elle prouve que la
prise de VIOXX à dose élevée multiplie par plus de trois le risque
d’infarctus et la mort subite par rapport au CELEBREX. Et même à dose
faible (les doses pratiquées en France), ce risque est multiplié par un
et demi. L’AFSSAPS reste muette.
Le 26 août 2004, devant les remous suscités par les révélations du Dr
Graham, Merck publie un communiqué de presse surréaliste : « Le
laboratoire Merck confirme l’efficacité et la sécurité, en particulier
cardiovasculaire, du VIOXX. »
En réalité, derrière son communiqué bravache, Merck est déjà en train de
préparer un enterrement de première classe à son médicament vedette.
Les dirigeants ont entre les mains les résultats intermédiaires d’une
autre étude qu’ils ont financée avec l’Institut national du cancer des
USA pour savoir si le VIOXX prévient la réapparition de polypes du
colon. L’étude devait durer trois ans. Mais après seulement dix-huit
mois, le groupe qui reçoit le VIOXX a connu deux fois plus d’infarctus
que le groupe placebo. Le 27 septembre 2004, les dirigeants de Merck
font savoir aux agences sanitaires embarrassées qu’ils jettent
l’éponge : le VIOXX va être retiré du marché. Le 30 septembre, c’est
chose faite.
Le 7 octobre 2004, l’Agence européenne du médicament a annoncé qu’elle
allait procéder à une nouvelle évaluation des coxibs pour savoir s’ils
augmentent le risque cardiovasculaire. Après tout, il ne s’est guère
passé que cinq ans depuis la communication des premières études
inquiétantes ...
La FDA est aujourd’hui accusée outre-Atlantique d’avoir failli à sa
mission. Trop de lenteur, trop d’atermoiements. Même les médecins
français s’y mettent ! Le 17 décembre, sur France 2, l’émission Complément
d’enquête se penchait sur le VIOXX et ses remous ... aux USA. Et la
France ? Invité sur le plateau, l’adjointe au directeur de l’AFSSAPS est
venue expliquer que chez nous, en raison de la vigilance des autorités,
l’affaire du VIOXX était une non-affaire. Les arguments de l’AFSSAPS
sont connus.
Le premier porte sur les doses : contrairement aux USA, où le VIOXX est
prescrit à la dose dangereuse de 50 mg/j, les doses en France ne
dépassaient pas 25 mg/j. D’où, assure-t-on à l’AFSSAPS, une bien
meilleure protection des patients français par rapport aux patients
américains. En réalité, plus de 80% des prescriptions américaines ont
porté sur les mêmes doses qu’en France. En Californie, 93% des
ordonnances étaient identiques aux ordonnances françaises. Selon une
analyse publiée en décembre 2004 dans Lancet, il n’y a d’ailleurs pas de
preuve que les doses de VIOXX inférieurs ou égales à 25 mg/j, comme
c’est le cas en France, afssent courir un risque plus faible que les
doses élevées.
L’AFSSAPS laisse aussi entendre que le VIOXX n’est dangereux que lors
d’une prise au long cours. Selon l’agence, le médicament était prescrit
en France pour de courtes durées, au contraire des USA. En réalité, les
patients américains ont pris le VIOXX en moyenne pendant trois mois, ce
qui n’est pas particulièrement long. En France, une enquête téléphonique
certes rapide auprès de trente et une pharmacies, et douze médecins,
réalisée pour ce livre, laisse penser qu’un grand nombre d’ordonnances
portaient sur « six mois renouvelables ». Plusieurs patients français
ont pris le VIOXX pendant des années. Il ne semble donc pas que les
américains aient pris le VIOXX beaucoup plus longtemps que les français.
Quoi qu’il en soit, même sur une durée courte, le VIOXX présenterait un
risque.
Sur la base d’une étude auprès de 1 394 764 patients californiens suivis
entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2001 (dont 26 748 ayant
pris du VIOXX), le Dr David Graham a estimé qu’aux USA, le VIOXX a pu
être responsable de 88 000 à 139 000 infarctus et morts subites, dont la
majorité (53%) provoquée par les doses en vigueur en France.
En France, L’AFSSAPS rassure en annonçant que « quelques centaines
d’accidents graves » seulement auraient été rapportés. C’est oublier un
peu vite qu’une fraction seulement (certains auteurs disent 1 à 2%) des
effets indésirables est signalée aux autorités sanitaires. Par exemple,
la FDA a reçu une moyenne de quatre-vingt-deux rapports signalant chaque
année des réactions indésirables à la digoxine. Un nombre relativement
faible, qui a longtemps fait penser que ce médicament ne posait pas de
gros problèmes, jusqu’à ce qu’une enquête sur les dossiers médicaux
révèle 202 211 hospitalisations dues la digoxine au cours d’une période
de sept ans.
L’AFSSAPS annonce aussi des données rassurantes issues de Cadeus, une
étude sur quarante mille patients mise sur pied à l’initiative du
ministère de la Santé pour suivre les conditions de prescription des
nouveaux anti-inflammatoires. Au moment où ce livre est achevé, les
résultats de Caldeus initialement prévus pour mars étaient repoussés à
octobre 2005. Mais cette étude, certes précieuse, souffre selon les
épidémiologistes que nous avons consultés de limitations importantes.
Beaucoup doutent qu’elle permette de se faire une idée du nombre de
victimes en France. Alors, comment l’estimer ?
Il y aurait eu, en France, environ dix fois moins d’ordonnances qu’aux
USA pour le VIOXX. S’il se confirme que plus de la moitié des accidents
attribués au VIOXX aux USA ont été provoqués par le dosage en vigueur en
France, il faut s’attendre à plusieurs milliers d’accidents graves dans
notre pays et non pas à « quelques centaines ».
Les dirigeants de Merck et les responsables de l’AFSSAPS partagent
conjointement la responsabilité de la catastrophe sanitaire que
représente le VIOXX. La passivité de l’AFSSAPS, alors que tous les
clignotants passaient au rouge, dès 2000, est inacceptable lorsqu’on
considère le nombre considérable de patients exposés et qu’on sait qu’il
existe des alternatives plus sûres. L’AFSSAPS avait les moyens
d’analyse pour se rendre compte que quelque chose clochait. « Si nous
pouvons faire ce type d’analyse, a dit Peter Jüni en décembre 2004, on a
du mal à comprendre pourquoi elle n’a pas été faite par les agences
sanitaires il y a plusieurs années. »
Il y a plus inquiétant encore : jusqu’au bout, les autorités sanitaires
ont donné l’impression de considérer que le VIOXX n’aurait pas dû être
retiré du marché !
La réaction, le 4 janvier 2005, du ministère de la Santé, décidément
toujours aussi mal conseillé depuis la campagne vaccinale contre
l’hépatite B (), donne bien la mesure de l’autisme des experts
français : « Le PDG de l’entreprise qui produit ce médicament, déclarait
le ministre, a décidé de le retirer pour raisons de marketing. Il a eu
peur pour le cours de Bourse de l’action de son entreprise et pour ses
actionnaires. C’est lamentable. »
En clair, si cela n’avait tenu qu’aux autorités sanitaires françaises,
le VIOXX serait toujours allègrement prescrit. Le 17 février 2005,
l’AFSSAPS a d’ailleurs déclaré, par la voix de son directeur général,
« assumer totalement la décision » de n’avoir pas retiré du marché les
anti-inflammatoires de la famille des coxibs. « Nous avons estimé que
ces produits gardaient un bénéfice-risque positif dans les indications
prévues par l’autorisation de mise sur le marché (AMM) ».
L’AFSSAPS était conforté par l’avis de l’Agence européenne du médicament
(EMEA) du même jour. L’EMEA a bien reconnu que les inhibiteurs de la
Cox-2 augmentent le risque cardiovasculaire, mais elle s’est contentée
de restreindre les conditions de prescription de ces médicaments.
Le 18 février 2005, un comité consultatif de la FDA s’est prononcé en
faveur du maintient du VIOXX sur le marché. Cet avis n’est que
consultatif, l’agence américaine étant libre de le suivre ou pas. Mais
les conditions dans lesquelles il a été obtenu sont instructives. Le
vote est intervenu à l’issue de 3 jours de débat. Le comité a également
voté pour le maintient du CELEBREX et du BEXTRA. Contrairement à ce qui
se passe au sein de l’EMEA, où les débats se tiennent à huis clos, les
audiences de la FDA sont publiques. Cette transparence, inscrite dans la
loi, permet d’en savoir un peu plus sur la manière dont les agences
sanitaires prennent ce genre de décision.
Parmi les membres du comité réuni par la FDA, 17 ont voté en faveur du
VIOXX, 15 pour son retrait. 31 membres ont voté pour le maintient du
CELEBREX de Pfizer, 1 a voté contre. Pour le BEXTRA, également fabriqué
par Pfizer, 17 ont voté pour le maintient, 13 ont voté pour un retrait, 2
se sont abstenus.
Selon une analyse conduite par une association de consommateurs de
produits de santé - le Center for Science in the Public Interest - 10
des 32 membres du commité de la FDA appelés à se prononcer sur ce sujet
avaient des liens avec Merck et/ou Pfizer. Ne serait-il pas instructif
de savoir comment ils ont voté ? Hé bien, il suffit de demander. D’après
l’agence Associated Press, les 10 experts liés à Merck et Pfizer ont
tous voté en faveur du CELEBREX et du BEXTRA. Le vote sur le VIOXX fut
presque aussi unanime : seul un expert sur les 10 s’est prononcé pour un
retrait.
Si le panel n’avait compté aucun expert travaillant pour Merck ou
Pfizer, il se serait prononcé à une large majorité pour le retrait du
VIOXX(14-8), et pour celui du BEXTRA (13-7).
Ecrit par : José K. aujourd’hui, 07:21 AM
QUOTE(Gascon @ Aug 30 2005, 02:15 PM) VIOXX ... CELEBREX
Rappelons que 75% des médicaments sont à base de plantes et que parmi
ceux-ci, certaines sont connues comme toxiques.Il faudrait donc, selon
les ’raisonnements’ gasconniens se méfier de toutes les plantes.
biggrin.gif Il vaut mieux écouter les avis de l’AFSSAPS que ceux de
Gascon, finalement : ils sont plus modérés.
Ecrit par : Gascon aujourd’hui, 11:56 AM
Troisième extrait du livre sur l’affaire du VIOXX.
du chapitre 6 « Gouvernement et Industrie » du livre « Au nom de la science » de Andew Goliszek et Thierry Souccar.
VIOXX 2, le retour
« J’ai été traité par le VIOXX 25 mg entre août 2000 et mars 2004, soit
environ quatre ans pour des problèmes d’arthrose, expliquait en décembre
2004 ce patient désemparé sur un forum de discussion. J’ai à présent
une coronaire totalement bouchée, une fréquence cardiaque à 100-112 et
suis soumis à des traitements pour risques cardio-vasculaires graves
dont une nouvelle statine (CRESTOR) qui ne m’inspire pas confiance ».
Ce patient n’a peut-être pas tord de considérer son comprimé de CRESTOR avec circonspection.
Le 18 novembre 2004, devant une commission du Sénat américain consacrée à
la catastrophe du VIOXX, le Dr David Graham a déclaré que la FDA est
« virtuellement sans défense » devant une autre « tragédie terrible »
comme celle du VIOXX. Si la FDA est sans défense, que dire de
l’AFSSAPS ? Tout est donc en place pour VIOXX 2, le retour. D’où
viendra-t-il ?
Le Dr Graham a fourni une liste de médicaments à surveiller de très
près : l’isotrétinoïne (ROACCUTANE, traitement de l’acné),
l’anti-inflammatoire valdécoxib (BEXTRA, non commercialisé en France),
l’antiasthmatique salmétérol (SEREVENT), la sibutramine (SIBUTRAL), un
coupe-faim, et ... notre CRESTOR (rosuvastatine).
La course aux milliards
Comme le VIOXX, tous ces médicaments participent à la course effrénée
des laboratoires pharmaceutiques aux fameux « blockbusters », ces
médicaments miracles capables chacun de générer plus d’un milliard de
dollars de chiffre d’affaires dans le monde entier. Des molécules
« hightech », comme le VIOXX qui devait libérer une population
vieillissante des troubles et des maux qui leur pourrissent la vie :
obésité, dépression, cholestérol, douleurs de l’arthrose,. Des
médicaments vite testés, vite commercialisés, dressés comme des dindes
de Noël et massivement promus pour bénéficier au mieux des vingt années
d’exclusivité - dix lorsqu’on retire la phase de mise au point - que
leur garantit leur brevet.
Les uns après les autres ou presque, ces médicaments sont retirés du
marché ou menacés de l’être après une avalanche d’effets indésirables,
voire de décès. Rappelons-nous les faits les plus marquants. En
septembre 1997, l’ISOMERIDE (dexfenfluramine) et le PONDERAL
(fenfluramine), deux coupe-faim très « tendance », sont poussés vers la
sortie après avoir fait plusieurs dizaines de milliers de victimes. Le 9
août 2001, après la mort de cinquante-deux malades, Bayer décide de
retirer sa Cérivastatine, un médicament vedette contre le cholestérol
élevé, vendu en France sous le nom de CHOLSTAT et de STALTOR. La
cérivastatine, petit tsunami, aurait fait 7577 décès dans le monde. Puis
vient le VIOXX. La coupe est pleine le 1er janvier 2005 lorsque le
British Medical Journal accuse le laboratoire Eli Lilly, à l’origine de
l’antidépresseur-star PROZAC (fluoxétine), d’avoir caché aux autorités
sanitaires les résultats d’une étude interne montrant un risque de
suicide plus élevé que ce que l’on pensait jusqu’ici.
Ces affaires jettent, bien sûr, un éclairage singulier sur les pratiques
des laboratoires pharmaceutiques, mais elles posent aussi le problème
épineux du rôle de police des agences sanitaires.
En France, c’est à l’AFSSAPS que revient la délicate tâche de garantir
que les médicaments sont efficaces et sont sûrs. Rien de bien facile
dans un pays où la consommation de médicaments est la plus élevée
d’Europe. En 1980, chaque français a acheté pour 95 euros de
médicaments. Vingt-cinq ans après, ce chiffre a été multiplié par plus
de cinq, enjeu d’une lutte sans merci entre les laboratoires.
Sur ce marché hexagonal juteux s’affrontent les poids
lourds de l’industrie, à grands coups de molécules présentées sous leur
jour le plus favorable. Et à grandes rasades de marketing. L’enjeu : la
prévention et le traitement des troubles de nos sociétés riches et
vieillissantes. Il arrive bien sûr qu’une de ces molécules hightech
apporte un bénéfice incontestable [ pas sûr ! ]. Mais beaucoup n’offrent
aucune réelle avancée et finissent souvent, comme on l’a vu, par être
retirées pour cause d’effets secondaires inacceptables.
Comment, alors, ont-elles réussi haut la main leur examen de passage,
décroché le fameux sésame, l’autorisation de mise sur le marché (AMM) ?
Pourquoi ensuite les autorités sanitaires françaises sont-elles restées
aveugles aux signes avant-coureurs des catastrophes ?
Le grand public l’ignore, mais la première cible du marketing des
laboratoires pharmaceutiques en quête d’une nouvelle AMM, ce sont
d’abord les agences sanitaires chargées de délivrer ce fameux sésame.
Avant de pouvoir être commercialisés, en effet, les nouveaux médicaments
vendus en France doivent convaincre de leur efficacité et de leur
innocuité soit l’AFSSAPS via sa commission d’AMM, soit la Commission
européenne après avis du Comité des spécialités pharmaceutiques (CSP) de
l’Agence européenne. L’AFSSAPS, comme toute agence des pays membres,
peut restreindre la libre circulation d’un produit ayant obtenu
l’estampille européenne s’il le juge dangereux.
L’entreprise de séduction des laboratoires en direction des autorités
sanitaires commence dès les essais cliniques, qui interviennent après
une phase de développement au cours de laquelle cultures cellulaires,
micro-organisme et animaux sont mis à contribution.
Les essais cliniques à proprement parler se déroulent essentiellement en
trois phases. Dans la phase 1, la molécule est testée sur un petit
nombre de volontaires en bonne santé : on vérifie qu’elle n’est pas
visiblement toxique, on étudie la manière dont le corps la métabolise.
Dans la phase 2, le médicament est pour la première fois administré à un
petit nombre de patients : on évalue sa tolérance et on recherche la
posologie adéquate. En phase 3, le traitement est comparé soit à un
placebo (une pilule sans effet), soit à un médicament de référence. Il
faut bien comprendre qu’aucun des essais cliniques n’est mené par les
agences sanitaires, comme l’AFSSAPS en France, ou la FDA aux USA. Les
essais sont conduits et financés par les laboratoires, et ce sont leurs
résultats qui sont analysés et interprétés par les experts des agences
pour la délivrance de l’AMM.
Il existe une phase 4, peu connue du public et pourtant cruciale : c’est
celle qui se déroule en conditions réelles. Elle permet d’affiner la
connaissance du médicament. A ce stade apparaissent souvent les effets
indésirables. Encore faut-il accepter de les voir.
Il faut que ...
12/05/2015 @ 22:09:09
par Admin
OU M ADRESSER car mon ...
07/05/2015 @ 20:41:53
par marie
OU M ADRESSER car mon ...
07/05/2015 @ 20:36:08
par marie
mon pere a prit ce ...
07/05/2015 @ 20:12:20
par marie